Riche patrimoine ampélographique, adaptation des cépages au réchauffement climatique, évolution des pratiques culturales et œnologiques, montée en gamme des vins, volonté de reconquête : les vins savoyards séduisent de plus en plus et attirent l'attention hors de nos frontières.
Les plus anciens témoignages concernant la culture de la vigne en Savoie remontent au Ier siècle avant J.C par des auteurs, tels que Columelle et Pline. Au cours du Moyen-Âge, les religieux contribuent considérablement au développement de la viticulture savoyarde. Les moines réalisent diverses expériences en matière de viticulture et de vinification, améliorant ainsi la qualité des vins. L’histoire des vins de Savoie connaît ensuite de nombreux tournants. Entre le Moyen-Âge et la Révolution, les surfaces viticoles de la région font l’objet d’une extension grâce à l’abolition du servage. Entre le XVIe et le XVIIIe siècle, les vignes sont cultivées sur des plaines, mais aussi sur des versants de plus de 1 000 mètres d’altitude environ. Afin de maintenir la qualité des vins et de limiter cette progression, le duc Emmanuel Philibert instaure le ban des vendanges, via un édit de 1559. Cette mesure est mise en place en vue de favoriser la récolte de raisins à bonne maturité.
L’arrivée du phylloxéra, survenant quelques années après l’annexion de la Savoie à la France en 1860, engendre des ravages considérables sur le vignoble. Cependant, grâce à un vaste mouvement de replantation et à la découverte de la technique du greffage sur porte-greffe américain, la surface du vignoble savoyard reste constante.
De nombreux faits marquent ensuite l’histoire du vignoble et améliorent la qualité de la production, notamment la modernisation des techniques culturales et des méthodes de vinification, mais aussi la maîtrise des rendements. Aujourd’hui, la région viticole compte plus de 2 000 hectares environ de vignes, dont une grande partie se trouve dans le département de la Savoie. Elle produit plus de 20 crus, déclinés en vins blancs (représentant environ 80% de la production totale), vins rouges (environ 17 %), vins rosés (environ 5%) et vins pétillants (environ 3%).
Implanté à l’Est de la France, le vignoble savoyard se distingue par sa nature verdoyante. Avec ses sols largement caillouteux, constitués de moraine et d’éboulis calcaires, cette région est particulièrement favorable à la culture de la vigne. Parfois continental et d’autres fois montagnard, le climat est également soumis aux influences du Sud et de la Méditerranée. Ces différentes caractéristiques favorisent la production d’une large variété des vins de Savoie.
Avec ces sols assez divers et ces climats variés, une grande diversité des cépages s’adapte parfaitement aux terroirs savoyards, permettant ainsi de produire des vins aux caractères diversifiés. En dépit de sa taille relativement réduite, le vignoble de Savoie se distingue par son riche patrimoine ampélographique avec ses 23 cépages dénombrés, sur les 250 variétés répertoriées en France, dont des cépages autochtones.
L’une des particularités des vins de Savoie repose sur la vingtaine de cépages cultivés, avec une part dominante de cépages autochtones. En effet, sept variétés sont cultivées uniquement dans le vignoble savoyard : l’Altesse, le Gringet, la Molette, la Jacquère, le Persan, la Mondeuse Noire et la Mondeuse Blanche.
Bien qu’un grand nombre de cépages soit cultivé dans le vignoble savoyard, certains le sont beaucoup plus que d’autres. Parmi les cépages blancs les plus plantés, on retrouve :
Le Gringet, l’Aligoté et le Chardonnay constituent d’autres cépages blancs utilisés pour la production de vins de Savoie.
Pour la production de vins rouges et rosés, la région viticole savoyarde cultive aussi divers cépages, notamment :
Outre ces variétés, d’autres cépages rouges sont cultivés dans le vignoble savoyard :
Les vins de Savoie peuvent être produits sous trois Appellations d’Origine Contrôlées : AOC Vin de Savoie, AOC Roussette de Savoie et AOC Seyssel. Ces dernières peuvent être complétées par des dénominations géographiques variées en fonction du terroir et des cépages utilisés. Certains crus sont produits en mono-cépage.
En vin blanc, l’AOC Vin de Savoie ou AOC Savoie peut être complétée par les dénominations géographiques suivantes :
Les vins rouges produits sur l’appellation Savoie peuvent porter les dénominations géographiques suivantes :
L’AOC Savoie produit aussi quelques vins rosés pouvant être élaborés à partir de l’ensemble des cépages autorisés. Aucune dénomination géographique ne vient compléter le nom de l’appellation.
Le vignoble savoyard produit aussi des vins blancs pétillants sur l’AOC Savoie Méthode traditionnelle ou AOC Savoie Ayze. Les cépages utilisés sont le Gringet et la Roussette d’Ayze. À la liste des pétillants de Savoie, s'ajoute la création officielle de l'appellation Crémant de Savoie AOC en 2025, comportant minimum 60% des cépages locaux dans son assemblage.
La diversité géologique combinée à des micro-climats spécifiques où sont travaillées de cépages indigènes donnent des vins d'une typicité remarquable selon les terroirs. À cela s'ajoute des variables considérables qui permettent aux vignerons de se distinguer en misant sur leurs spécificités : les importantes amplitudes thermiques entre le jour et la nuit permettent aux raisins le développement d'arômes complexes, là où l'altitude des vignes perchées sur les versants confère aux vins une fraîcheur et une finesse notoires.
Des cuvées à ouvrir dans leur jeunesse et qui ont en commun un faible degré d'alcool.
Restés longtemps associés à la raclette, à la tartiflette ou encore à la fondue, où le vin blanc entre dans l'élaboration de la recette, les vins de Savoie d'aujourd'hui se distinguent.
Certes, les inconditionnels des spécialités savoyardes favoriseront en hiver le mariage incontournable des fromages et des vins du même terroir pour un accord régional, mais la finesse des cuvées dépasse de loin l'image d'Épinal "Vin de Savoie raclette".
Montant rarement au-dessus de 12 degrés en volume d'alcool, les vins de Savoie séduisent pour être légers, mais concentrés en arômes et dans leur structure, dans un profil aérien qui plaît de plus en plus aux consommateurs. Blancs ou rouges, désormais, les vins de Savoie ne sont plus des vins de saison et la montée en gamme des effervescents dépassent d'ailleurs ce cliché réducteur loin des contrées locales. En atteste la récente création de l'appellation Crémant de Savoie officiellement présentée à Paris (2015) au restaurant triplement étoilé du Chef savoyard Guy Martin.
Boudés auparavant par les consommateurs, les vins de Savoie connaissent un remarquable renouveau depuis les années 2010. Ce vignoble particulièrement dynamique s’est notamment lancé dans la reconquête du patrimoine ampélographique, engendrant une montée en gamme des vins de Savoie. Cette volonté est largement appuyée par le Syndicat Régional Des Vins De Savoie (S.R.V.S.) qui veille à défendre la qualité des vins et le Comité Inter-professionnel des Vins de Savoie (CIVS) qui s'applique à promouvoir les vins de la région.
L'ambition de remonter la réputation des vins de Savoie se retrouve dans l'ensemble du vignoble. Le cépage Mondeuse en illustre le changement et préfigure la tendance.
Réputé pour offrir les vins rouges les plus corsés de la Savoie sans manquer de fraîcheur, la Mondeuse fait une entrée remarquée sur le devant de la scène : souples et épicés, ces vins rouges en monocépage étonnent le palais des plus connaisseurs. Autrefois destinées à la consommation comme "vin de table", les vignerons savoyards tirant profit du rendement du cépage, les récoltes étaient vinifiées sans égrappage et en cuvaison longue de plus de quinze jours, donnant des mondeuses parfois âpres et austères, car trop tanniques. Heureusement, les méthodes ont changé ! Les vignerons passionnés et amoureux de leur terroir ont appris à sublimer la Mondeuse en vin de cépage, mais aussi en assemblage en l'équilibrant avec d'autres cépages indigènes.
Cépage tardif et vigoureux, la Mondeuse se plaît dans les vignobles d’altitude en pente. Toutefois, le réchauffement climatique accélère son mûrissement et change la donne dans la région, ce qui profite aux vignerons de vins d'altitude. L’adaptation et l'amélioration des pratiques culturales et œnologiques ont permis la production de vins haut de gamme. Finesse et concentration surprenante des arômes placent désormais de la Mondeuse de Savoie au sommet des vins de gastronomie. Épicée, puissante et fruitée, sa finesse peut rappeler le poivre et la violette des Côtes Rôtie.
Les vins rouges reflètent les effets de grands millésimes sur le cépage rouge emblématique du vignoble savoyard, la Mondeuse. Quant aux vins blancs, ils expriment pleinement leur singularité. Ces pratiques en monocépage tendent à évoluer sur une logique parcellaire pour accentuer la rareté des cuvées.
Outre les 22 cépages déjà inscrits dans le cahier des charges, d’autres variétés rarissimes y ont été inscrites avec l’aval de l’INAO et font leur entrée : Douce Noire, Bia Blanc, Dousset, Mondeuse Grise, Hibou Noir, Pinot Gris et Petite Sainte-Marie. L’utilisation de ces divers cépages permet aux vignerons de la région d’élaborer un large panel de cuvées originales.
Il est indéniable que cette montée en gamme s'accompagne de l'arrivée des jeunes vignerons et vigneronnes qui contribuent pour beaucoup à l'essor de la réputation des vins de Savoie. Conscients de la richesse de ce patrimoine viticole, nombre d'entre eux favorisent la biodynamie, ce qui incite les anciens, eux aussi, à changer de braquet pour suivre le sursaut qualitatif.
Préservation des sols et de la biodiversité pour la mise en avant du terroir et l'authenticité des cépages autochtones, le choix de la qualité aux dépens de la quantité se combine au travail minutieux de la vigne que la rudesse du terrain en pente oblige à vendanger manuellement. Il n'y pas de mécanisation possible et le gel de printemps menace souvent les rendements. Ces conditions justifient parfois le coût élevé de la bouteille pour ces vins à l'avenir prometteur.
Le passage dans les années 2020 est marqué par un nouveau podium dans la préférence des vins chez les Français. Le vin blanc est la couleur qui passe en tête. Ils sont plus nombreux à rechercher des vins ayant un faible volume d'alcool, tandis qu'ils sont plus attentifs aux labels environnementaux : ils consomment moins, mais mieux. Autrement dit, les consommateurs les plus occasionnels regardent l'étiquette de la bouteille, même pour accompagner l'immanquable raclette. En somme, les vins savoyards correspondent aux critères actuels de consommation.
Quant au grand amateur de vin en quête de nouveautés et de pépites, c'est tout à fait le profil qui déniche les trésors méconnus de talentueux et ambitieux vignerons savoyards. Pour sortir des sentiers battus, les vins savoyards tirent leur épingle du jeu !
Baromètre SOWINE/Dynata 2024
Soit ! Depuis les années 2020, les vins de Savoie ont dépoussiéré leur image de vins âcres qui collent au fromage fondu. Les mariages gastronomiques avec des vins frais séduisent de plus en plus et les récompenses ne tardent pas à tomber, comme en témoigne en 2021, le Château de la Violette qui s'est fait remarquer dans le classement des meilleurs Chardonnay du Monde avec sa cuvée Vin de Savoie Domaine Charles Gonnet – Chardonnay 2020.
Sommeliers et restaurateurs de la région ont donné le LA en mettant sur leur carte les désormais célèbres domaines des Ardoisières, Château de Mérande, Domaine Anne-Sophie et Jean-François Quénard, etc. Londres, New York, Chine, le succès est tel que les vins savoyards ont aussi conquis cavistes et Chefs étoilés de la gastronomie française à l'étranger. La demande est telle que les vignerons ont du mal à y répondre, car les rendements sont faibles.
Les vins de Savoie gagnent à être connus et méritent toute l'attention pour qui aime les découvertes gustatives. Légers, vifs, frais, aériens, l'attrait pour les vins de Savoie est là, tant pour les buveurs occasionnels que pour les grands amateurs de vin. On ne peut que se réjouir de cette percée sur le marché du vin !
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dans la catégorie “Vins, bières et spiritueux”
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