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LA FÉE VERTE, LE LÉGENDAIRE ALCOOL ANISÉ

Portant le nom scientifique d’« Artemisia absinthium », l’absinthe désigne une plante aromatique connue depuis l’Antiquité pour ses propriétés médicinales (maux d’estomac, nausées liées au mal de mer). Elle est utilisée comme apéritif dès la fin du XVIIIe siècle. La première recette d’absinthe distillée aurait contenu du fenouil et de l’anis vert. La recette originale aurait été inventée par le docteur Pierre Ordinaire en 1792. Une autre légende veut que la première recette d’absinthe, utilisée comme boisson médicinale, ait été mise au point en Suisse par la mère Henriod. Elle l’aurait ensuite vendue au major Dubied. Ce dernier ouvre ensuite avec son gendre, Henri-Louis Pernod, la première distillerie d’absinthe en 1798. Cette dernière est implantée à Couvet, dans le Val-de-Travers, en Suisse, considéré comme le berceau de l’absinthe. En 1805, Henri-Louis Pernod crée sa propre distillerie d’absinthe à Pontarlier sous la marque Pernod Fils, première marque de spiritueux français. Pendant plusieurs années, la région de Pontarlier reste la capitale de l’absinthe.

Au cours des années suivantes, l’absinthe rencontre un franc succès. Elle est notamment popularisée grâce aux soldats français à leur retour en France après l’occupation de l’Algérie. La popularité de l’absinthe, relativement chère, accroît principalement chez les bourgeois. Également appelée « Fée Verte » ou « Bleue » en raison de sa couleur distinctive, l’absinthe est aussi indissociable de l’univers de nombreux poètes et peintres de la Belle Époque : Van Gogh, Rimbaud, Verlaine, Baudelaire ou encore Manet. La hausse de popularité de cette boisson entraine ensuite une explosion de la production et une baisse significative des prix. Ainsi, en 1870, l’absinthe devient l’apéritif le plus consommé dans l’Hexagone.

Après son succès fulgurant, l’absinthe traverse une période difficile. Accusé de rendre fou, de causer des hallucinations et bien d’autres maux, ce nectar est interdit dans de nombreux pays, notamment en France. Règlementées, la production et la consommation de cette boisson anisée sont à nouveau autorisées dans plusieurs pays européens en 1988. L’absinthe peut être « verte », colorée par une infusion après la distillation, ou « blanche » (bleue en Suisse), sans infusion supplémentaire.

Quatre plantes sont à la base de la recette de l’absinthe : la petite et la grande absinthe, le fenouil et l’anis vert. Toutefois, selon les recettes, d’autres plantes peuvent être utilisées comme la menthe, l’angélique ou encore la coriandre.

COMMENT BOIRE L'ABSINTHE ?

L’absinthe doit notamment sa popularité à sa dégustation, impliquant un rituel précis et singulier. Pour développer les arômes et les saveurs de ce spiritueux, il est conseillé de le diluer avec de l’eau fraîche. En général, le dosage consiste à ajouter 3 à 5 volumes d’eau pour un volume d’absinthe. Idéalement, l’eau se verse lentement, goutte à goutte, pour une meilleure expression des huiles essentielles des différentes plantes. Cette dilution lente permet aussi d’éviter un choc thermique. Au fur et à mesure de l’ajout d’eau, l’absinthe commence à se troubler, formant de fines spirales, avant d’opacifier entièrement le verre en corolle. Ce spiritueux peut aussi être dégusté avec du sucre pour en atténuer l’amertume. Posé sur une cuillère à absinthe, le sucre se dissout lentement au contact de l’eau.

CUILLÈRE À ABSINTHE

Également connue sous le nom de « pelle à absinthe », la cuillère à absinthe se présente sous forme d’une cuillère large, plate et percée. Elle est utilisée pour la préparation d’une absinthe au sucre. Peu soluble dans l’alcool, le sucre fond petit à petit sur la cuillère. L’eau sucrée passe à travers les trous et tombe ainsi progressivement dans le verre.

POURQUOI L'ABSINTHE A ÉTÉ INTERDITE EN FRANCE ?

À cause du prix dérisoire de cet alcool au cours du XIXe siècle, de nombreuses absinthes de qualité douteuse ont fait leur apparition sur le marché. Ces boissons frelatées ont été à l’origine de cas d’intoxications sévères. Pointées du doigt, elles ont été accusées de tous les maux : boisson addictive, aux effets abortifs ou hallucinogènes. Des ligues antialcooliques, dirigées notamment par les médecins Claude Bernard et Louis Pasteur, mènent alors des campagnes de mobilisation pour l’interdiction de l’absinthe. L’Église Catholique, la presse ainsi que certains syndicats se joignent à la mobilisation. La fabrication et la vente de l’absinthe sont ainsi interdites sur tout le territoire suisse, puis aux États-Unis.

En 1915, cette boisson est déclarée illégale en France. La démocratisation, la forte teneur en alcool ainsi que la présence de thuyone incitent les autorités de l’époque à prohiber la production d’absinthe. Cette molécule présente dans la plante d’absinthe engendre des effets indésirables comme des convulsions, voire des hallucinations. En 1988, un décret européen autorise la présence d’un taux de thuyone de 35 mg par litre dans les spiritueux. Cet alcool interdit retrouve ainsi ses lettres de noblesse. Il est de nouveau produit et consommé dans plusieurs pays européens, notamment en France.